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RD Congo : la société civile ne veut pas de la nouvelle loi sur la CENI ...

RD Congo : la société civile ne veut pas de la nouvelle loi sur la CENI
(Syfia Grands/RD Congo) Le vote de la loi réorganisant la CENI (Commission électorale nationale indépendante) le 14 janvier par l'Assemblée nationale congolaise, sans tenir compte des amendements proposés par le Sénat, a révolté la société civile. Selon elle, la large majorité donnée aux représentants des partis politiques hypothèque son indépendance.
 
Le coordonnateur national de la Nouvelle société civile congolaise (NSCC), Jonas Tshiombela, est fou furieux. Les démarches menées au Sénat pour dépolitiser la Commission électorale nationale indépendante (CENI) n’ont pas abouti. L'Assemblée nationale est passée outre une série de divergences majeures avec le Sénat au sein de la commission mixte paritaire entre les deux chambres. La majorité de l'assemblée a ainsi adopté, le 14 janvier, le projet de loi qui réorganise la CENI tel qu’il avait été envoyé en seconde lecture au Sénat sans tenir compte des amendements proposés.
 
Dans une déclaration rendue publique le 21 janvier à Kinshasa, à l’issue d’une concertation initiée par les organisations des droits humains et de promotion de la démocratie, la société civile demande ainsi au président de la République de ne pas promulguer la loi modifiée sur la CENI. Pour la NSCC, "cette emprise politicienne délibérée sur la CENI hypothèque l’indépendance, la neutralité et la crédibilité de cette institution technique d’appui à la démocratie et partant la suite du processus électoral lui-même".
Le Sénat avait pourtant cherché, à travers des modifications subtiles, à faire de la CENI une institution réellement indépendante, neutre, dotée d’un bureau et d’une assemblée plénière. Il proposait que la CENI soit composé de 26 membres à raison d’un par province – les 25 prévues par la constitution, plus un pour la ville de Kinshasa dont 12 délégués issus des organisations de la société civile, 8 de la majorité et 6 délégués de l'opposition. Le Sénat suggérait aussi que les membres du bureau de la CENI soient élus par leurs pairs sous la présidence d’un bureau provisoire.

L'Assemblée nationale a le dernier mot
Il n’en sera rien si le chef de l’Etat promulgue le texte en l’état, en suivant la volonté des députés nationaux. Ce qui fait dire aux ténors des organisations de la société civile que la Majorité présidentielle préfère continuer à avoir la mainmise sur la CENI, en contrôlant toutes ses structures. Car l’Assemblée nationale a décidé que la CENI serait composée de 13 membres, majoritairement désignés par les forces politiques : 6 délégués pour la majorité politique au pouvoir et 4 pour l’opposition politique et 3 délégués pour la société civile. Selon le texte de loi, les membres de la CENI et ceux du bureau doivent être désignés par les forces politiques présentes à la chambre basse. La session extraordinaire consacrée, entre autres, à ce projet de révision jugé important n’aura donc servi à rien.
Les associations de la société civile sont donc montées au créneau pour fustiger le manque de souplesse et d’esprit d’ouverture des députés nationaux qui ont préféré passer en force pour faire aboutir leurs idées. Ceux-ci ont pu le faire car une disposition de la Constitution prévoit qu'en cas de divergence entre l’Assemblée nationale et le Sénat, c’est le point de vue de l’Assemblée nationale qui prime.

Tirer les leçons des dernières élections
Les élections du 28 novembre 2011 avaient jeté le discrédit sur le processus électoral en cours, poussant la classe politique congolaise et certains partenaires extérieurs de la RD Congo à exiger la restructuration et la réforme de la loi portant fonctionnement et composition de la CENI. On devait y intégrer des délégués de la société civile, pour que cette institution devienne véritablement indépendante, sans injonction politique.
Pour Me Pathy Lendo de l’Opposition scientifique, cependant, le vrai problème de la CENI est de trouver des hommes compétents, intègres et intellectuellement honnêtes pour diriger cette institution. "Ces hommes, dit-il, existent. On peut les trouver aussi bien dans la majorité au pouvoir que dans l’opposition, pas uniquement dans la société civile", assure-t-il. "La société civile est composée des Congolais. Et tous ont cette même faiblesse devant l’argent. Le chienlit qui a prévalu lors des scrutins du 28 novembre 2011 est assez éloquent". Et si cela ne dépendait que de son courant de pensée, "il souhaiterait même que la présidence de la CENI soit confiée à un diable qui aura intérêt à s’amender pour entrer au ciel plutôt qu’un prêtre…" Pour le professeur Philippe Biyoya, la faute est à "la faiblesse de nos partis politique qui ne sont pas compétitifs et veulent gagner en administrant la CENI. " Il ne croit pas non plus beaucoup en cette société civile qui ne représente pas "une force réelle sur terrain", mais qui est juste "constituée de groupuscules d’intérêts".
Didier Kebongo
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