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Discours du Représentant Spécial du SG de l'ONU ...

Discours du Représentant Spécial du

Secrétaire-General des Nations Unies

et chef de la MONUSCO, Martin Kobler,

à l’occasion du 13ème Anniversaire de

la résolution 1325 Kinshasa

On ne pouvait espérer meilleur contexte pour célébrer l’engagement des femmes en faveur de la paix et de la sécurité.

En effet, il y a huit jours, lors de son adresse au congrès, le Président Kabila a fait des propositions importantes pour une plus grande participation des femmes dans la vie politique congolaise.

Et c’est vrai que, lorsque vous, mesdames, n’êtes pas activement et fortement représentées dans la vie politique, ce sont tous les membres de la société qui enpâtissent. Or, malgré vos compétences, malgré votre énergie, malgré votre immense capacité de résilience vous êtes encore largement minoritaires dans les institutions politiques de toutes les régions du monde.

Je repense avec plaisir aux sourires qui se sont dessinés sur les visages des femmes lorsque le Président Kabila a approuvé la proposition de faire obligation aux formations politiques de présenter, sur chaque liste de candidats, au moins 30% de femmes. Ce sont des avancées importantes et je me réjouis à l’avance d’observer la mise en application de ces propositions.

Les cyniques vous diront surement que ce n’est pas suffisant, qu’il faut s’attaquer à la racine du problème. Ils vous parleront des difficultés structurelles, du faible accès à l’école, du poids des stéréotypes et des coutumes. Ils ont sans doute raisons. Mais si la route est encore longue, nous avançons dans la bonne direction.

En République Démocratique du Congo, la place des femmes dans l’économie est essentielle. C’est vous que je vois dans les champs, c’est vous que je vois au marché. Et vos enfants en sont les premiers bénéficiaires. En effet, l’augmentation de la part des revenus du ménage gérée par les femmes influence les dépenses d’une façon bénéfique pour les enfants. Vous avez cette capacité d’anticiper qui permet de construire la paix.

De plus, il est important que, dès le lendemain des conflits, les femmes soient dotées des ressources nécessaires capables de faire d’elles des entrepreneurs ou des agriculteurs. Le redressement économique qui doit faire suite à une période de conflit, ne peut pas se faire sans le plein engagement des femmes.

Il faut aussi soutenir l’éducation des femmes. En effet, un enfant dont la mère sait lire a 50% de chance en plus de vivre qu’un enfant dont la mère est analphabète. J’insiste sur l’importance de l’accès des filles à l’éducation. En RDC 70% des femmes politiques et leaders de la société civile estiment que l’analphabétisme est un obstacle majeur à la participation politique des femmes. Mesdames, mais aussi messieurs, envoyez vos filles à l’école ! Ce sont elles, avec leurs frères, qui construiront la RDC de demain.

Je voudrais ici m’adresser aux hommes présents dans la salle. Promouvoir le rôle des femmes dans la société et dans la construction de la paix ce n’est pas agir contre les hommes. Au contraire. Une égalité parfaite ne peut se faire qu’avec le soutien complet de tous les hommes. Une égalité parfaite n’aura de résultats positifs que si la coopération est parfaite.

La résolution du Conseil de sécurité 1325, dont nous célèbrerons demain les 13 ans, souligne l’importance d’une participation active des femmes dans la prévention et le règlement des conflits. Il y est également dit que votre rôle, à vous les femmes, est essentiel dans l’édification et le maintien de la paix. La résolution 1325 appelle les États Membres à faire en sorte que les femmes participent pleinement, sur un pied d’égalité avec les hommes, à tous les efforts visant à maintenir età favoriser la paix.

Dans toutes les sociétés, les femmes sont des éducatrices pour la paix, dans leur famille et dans la société. Vous êtes indispensables car vous bâtissez des ponts là ou d’autres érigent des murs. Je vous demande d’exercer tout votre pouvoir d’influence pour que vos fils, vos frères et vos maris n’intègrent pas les groupes armés. Il faut également que vous sensibilisiez ceux qui sont déjà en train de se battre pour qu’ils rendent les armes et rentrent à la maison.

J’étais il y a deux jours à Kiwanja alors que la ville venait d’être libérée. J’y suis allé en compagnie de Julien Paluku, le Gouverneur de la Province du Nord-Kivu, qui a passé un message important : « maintenant il va falloir pardonner ». Ce n’est jamais facile de pardonner. Mais je compte sur vous. Je compte sur vous les mamans pour être les premières à pardonner. Parce que vous savez qu’il faut savoir pardonner àses enfants, qu’il faut pardonner à ses frères et ses sœurs. Parce que vous savez que la paix ne se construit jamais seul. Il n’y a pas de paix sans l’autre.

Toute la zone de Kiwanja-Rutshuru au Nord-Kivu est maintenant une zone libérée ou, avec le soutien de la MONUSCO, l’Etat commence déjà à réimplanter son autorité. Hier, les premiers éléments de la Police Nationale Congolaise ont commencé à arriver. Je souhaite que l’on trouve des femmes dans toutes les administrations. C’est important. On sait par exemple que la présence de femmes dans la Police favorise la dénonciation des crimes sexuels.

D’ailleurs, je ne peux pas terminer sans aborder le sujet des violences sexuelles en conflits. Ce que j’appelle le terrorisme sexuel. Ce terrorisme sexuel est un crime de guerre et c’est un sujet pour lequel j’ai une tolérance-zéro.

Il y a quelques semaines j’ai été accueilli à l’HopitalPanzi, près de Bukavu. J’y ai rencontré des femmes et des filles qui ont subi des atrocités inimaginables. Des femmes que l’on a humiliées, que l’on a torturées. Et vous savez ce qu’elles m’ont demandé ? Aucune des femmes présentes n’a appelé à la vengeance. Elles avaient toutes le même message : la paix. Ses femmes qui ont subi les violences les plus dures n’avaient pas d’autre message que la paix.

Je voulais terminer ce discours en vous parlant de l’avenir, en évoquant la place des femmes dans la société de demain. Cela aurait été une erreur. Consolider la contribution des femmes de la RDC et de la région des grands lacs pour la paix et la stabilité n’est pas un projet d’avenir. C’est une action permanente et actuelle. La contribution des femmes à un environnement durablement sécurisé n’est pas un projet d’avenir, c’est une action de tous les jours et de chaque instant. C’est vous Mesdames qui construisez un cadre social fait de dialogue, d’écoute et de paix. Vous et vos enfants forgez des aujourd’hui la paix de demain.

Bravo à vous et merci.

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